jeLes infections chroniques et la défense contre les tumeurs conduisent souvent au phénomène d’épuisement des lymphocytes T du système immunitaire : les lymphocytes T perdent progressivement leur fonction, ce qui altère leur capacité à réagir contre le cancer et les infections. Les mécanismes moléculaires qui contrôlent cette perte de fonction ne sont pas encore entièrement compris.
Il est désormais clair que le processus d’épuisement est fortement influencé par les « centrales énergétiques des cellules », les mitochondries.
Lorsque la respiration mitochondriale échoue, une cascade de réactions est déclenchée, aboutissant à la reprogrammation génétique et métabolique des cellules T – un processus qui entraîne leur épuisement fonctionnel. Mais cet « épuisement » des cellules T peut être contrecarré : une optimisation pharmacologique ou génétique du métabolisme cellulaire augmente la longévité et la fonctionnalité des cellules T. Ceci peut être réalisé, par exemple, en surexprimant un transporteur de phosphate mitochondrial, qui pilote la production de l’adénosine triphosphate, une molécule fournissant de l’énergie.
Une équipe dirigée par le Dr. Martin Vaeth de l’Institut d’immunologie des systèmes de l’Université Julius Maximilians (JMU) de Würzburg dans la revue Communication naturelle. « Nous sommes optimistes que nos résultats contribueront à améliorer l’immunothérapie du cancer », déclare le scientifique.
Amélioration possible de la thérapie cellulaire CAR T
Par exemple : la thérapie cellulaire CAR T a montré une efficacité remarquable dans le traitement de la leucémie et du lymphome. Les cellules CAR-T sont des lymphocytes développés en laboratoire pour lutter contre le type de cancer concerné. Cependant, les cellules CAR T sont également sujettes à l’épuisement dans les tumeurs solides, limitant leur succès dans ce contexte.
« Nos expériences montrent que l’augmentation du métabolisme mitochondrial augmente également la longévité et la fonctionnalité des cellules T spécifiques du virus dans les infections chroniques », explique le scientifique du JMU. Il est plausible que cette stratégie puisse également être utilisée pour améliorer les immunothérapies basées sur les lymphocytes T pour le traitement du cancer.
Les expériences en détail
« On pensait généralement que les changements observés dans le métabolisme (énergétique) des mitochondries résultaient de l’épuisement des lymphocytes T », explique Vaeth. Pour montrer que le dysfonctionnement mitochondrial est à l’origine de l’épuisement des lymphocytes T, son groupe de recherche a développé un nouveau modèle génétique. Il désactive le transporteur de phosphate mitochondrial (SLC25A3) et paralyse la respiration mitochondriale des cellules T.
Cela oblige les cellules T à passer à des voies métaboliques alternatives, principalement la glycolyse aérobie, pour répondre à leurs besoins bioénergétiques sous forme d’adénosine triphosphate. Cependant, cette adaptation métabolique conduit à une production accrue d’espèces réactives de l’oxygène dans les cellules T.
Des quantités accrues de radicaux oxygène empêchent la dégradation du facteur de transcription 1 alpha inductible par l’hypoxie (HIF-1-alpha). L’accumulation de protéine alpha HIF-1 entraîne une reprogrammation génétique et métabolique des cellules T et accélère leur épuisement.
« Ce contrôle de l’épuisement des lymphocytes T dépendant du HIF-1 alpha était inconnu auparavant. Il représente une boucle de contrôle critique entre la respiration mitochondriale et la fonction des lymphocytes T et sert de « point de contrôle métabolique » dans le processus d’épuisement des lymphocytes T », explique Vaeth.
Considérer les tissus comme un environnement pour les cellules T
Son équipe souhaite ensuite étudier comment la respiration mitochondriale influence la programmation épigénétique des cellules T, par exemple via des modifications post-traductionnelles des histones, et l’interaction du métabolisme des cellules T avec le microenvironnement tissulaire local.
Selon Martin Vaeth, cela est particulièrement important car l’apport en nutriments et la pression en oxygène dans les tumeurs diffèrent considérablement de ceux des tissus sains et les cellules T doivent réagir activement à cet environnement difficile. De nouveaux développements techniques tels que les analyses du transcriptome spatial et du métabolome offrent de nouvelles opportunités passionnantes pour étudier ces questions de manière systématique et à haute résolution dans le contexte du microenvironnement tissulaire.